Incontinence et surcharge pondérale : un lien avéré
Bien que peu connu, le lien entre surcharge pondérale et incontinence urinaire est bien réel. D’ailleurs, sans même aller jusqu’à l’obésité, un simple surpoids constitue un facteur de risque, au même titre que l’âge, le tabagisme, les accouchements multiples, etc. L’étude norvégienne EPINCONT, menée sur 28 000 femmes, a notamment permis de démontrer que le risque d’incontinence urinaire est directement lié à l’IMC [1]. En outre, plus le poids est élevé, plus le risque est élevé, jusqu’à cinq fois plus en cas d’obésité sévère (IMC supérieur à 35 kg/m2). Selon les études, chaque augmentation de 5 unités d’IMC est associée à une augmentation de 20 % à 70 % du risque d’incontinence urinaire [2].
Comment expliquer la relation entre excès de poids et fuites urinaires ?
Le surpoids a tendance à accroître principalement l’incontinence mixte, c’est-à-dire à la fois l’incontinence à l’effort (fuites urinaires causées par un effort physique, un rire, une toux ou un éternuement) et l’incontinence par impériosité (besoin irrépressible d’uriner rapidement). Pourquoi ? Tout simplement parce que la surcharge pondérale, en particulier lorsqu’elle est localisée au niveau de la sangle abdominale, provoque une augmentation du diamètre de la cavité abdominale et de la pression intra-abdominale. Cette pression s’applique de façon constante sur la vessie, sur les muscles du périnée, ainsi que sur les muscles des sphincters urétral et anal, qui finissent par s’affaiblir. Par ailleurs, le plancher pelvien soutenant les organes pelviens (vessie, anus, utérus, viscères) s’affaisse peu à peu. Tout cela a pour conséquences de nombreux désagréments tels que des fuites urinaires mais aussi des gaz, un manque de sensations intimes, voire une descente d’organes.
Le diabète, également mis en cause
En effet, après plusieurs années d’évolution du diabète, l’hyperglycémie chronique (taux de sucre dans le sang élevé de façon permanente) altère les nerfs qui régulent la tonicité des muscles de la paroi de la vessie (le détrusor) et du sphincter urétral [3]. La vessie peut alors devenir “paresseuse”, c’est-à-dire qu’elle ne se vide plus totalement lors de la miction, ce qui génère des fuites urinaires ; on parle d’incontinence par regorgement. Ou bien au contraire, la vessie peut devenir hyperactive et entrainer une incontinence par impériosité.
La perte de poids : une solution efficace
La bonne nouvelle est que la perte de poids, même modérée (5 à 10 % du poids corporel), est efficace pour réduire significativement la sévérité de l’incontinence urinaire et améliorer la qualité de vie [4]. Elle devrait être considérée à ce titre comme le traitement de première ligne chez les patients en surpoids ou obèses concernés par ce trouble urinaire.
Des chercheurs de l’Université de Californie (San Francisco) ont évalué précisément les effets d’une perte de poids chez 338 femmes en surpoids ou obèses, âgées de 42 à 64 ans et victimes d’au moins 10 épisodes d’incontinence urinaire par semaine. Ces femmes ont participé à un programme de perte de poids intensif de 6 mois et ont perdu ainsi 8 kilos en moyenne. Cette perte de poids a été associée à une réduction moyenne de 47 % du nombre hebdomadaire d’épisodes d’incontinence urinaire, réduction pouvant aller jusqu’à 70 % pour des pertes de poids supérieures [5].
La réduction de l’incontinence urinaire peut donc être ajoutée à la longue liste des bénéfices pour la santé associés à la perte de poids.
Attention au sport !
Si la pratique d’une activité physique et/ou sportive est recommandée pour lutter contre la surcharge pondérale, il convient cependant de choisir celle-ci avec soin en cas d’incontinence urinaire. En effet, certains sports sont alors déconseillés, en particulier ceux impliquant des efforts violents ou des forts impacts au sol. La marche, le vélo, le yoga ou encore la natation sont particulièrement indiqués pour favoriser la perte de poids sans solliciter trop brusquement les muscles du périnée.
Pour des résultats optimaux, il est conseillé d’accompagner la perte de poids d’une rééducation périnéale pour renforcer les muscles du périnée. N’hésitez pas à demander conseil à votre médecin ou à votre urologue.
Références
- Hannestad Y, et al. Are smoking and other lifestyle factors associated with female urinary incontinence? The Norwegian EPINCONT study. BJOG 2003;110:247-54
- Subak LL, et al. Obesity and urinary incontinence: epidemiology and clinical research update. J Urol. 2009;182(6 Suppl):S2-7
- Gorbachinsky I, et al. Metabolic syndrome and urologic diseases. Rev Urol 2010;12:e157-80
- Auwad W, et al. Moderate weight loss in obese women with urinary incontinence: a prospective longitudinal study. Int Urogynecol J Pelvic Floor Dysfunct. 2008;19(9):1251-9
- Subak LL, et al. Weight loss to treat urinary incontinence in overweight and obese women. N Engl J Med. 2009;360(5):481-90